Antoine Dufilho : biographie d’un sculpteur du mouvement

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Une double origine : art et automobile

Pour Antoine Dufilho, l’art et la passion automobile se croisent dès l’enfance. Il grandit au contact de son grand-oncle Jacques, comédien, peintre et sculpteur. Jacques possédait aussi une collection privée de voitures Bugatti, à l’image de sa très belle Type 37. Antoine observe, dessine, apprend.

Cette double filiation, artistique et mécanique, devient la matrice de son univers. Un langage qu’il explorera plus tard sous forme de volumes, de strates et de reflets. Il le dit lui-même : « C’est en ayant conscience de ses racines qu’un homme peut grandir. »

Médecine, architecture, sculpture : une trajectoire construite

Avant de devenir sculpteur, Antoine entame des études de médecine. Trois années passées à étudier la biomécanique humaine. Une rigueur scientifique, mais une créativité bridée. Il bifurque alors vers l’architecture.

Diplômé de l’École d’Architecture de Lille, il construit son atelier à partir de containers maritimes. En 2012, il s’y consacre pleinement à la sculpture. « J’ai voulu expérimenter la construction, la déconstruction… mais surtout libérer l’énergie d’un volume figé », explique-t-il.

Une œuvre façonnée par l’expérimentation

Antoine est autodidacte. Il forge, soude, découpe. Le sculpteur travaille des matériaux industriels : aluminium, inox, acier corten. L’artiste joue avec la lumière et les reflets pour créer une illusion de mouvement. Ses sculptures alternent pleins et vides. Elles évoluent au gré des pas du spectateur.

Son objectif : figer le mouvement tout en le suggérant. Chaque œuvre est conçue pour être perçue en rotation, en variation, en vibration. Le vide devient un élément de narration. L’observateur devient acteur.

L’invention du style « Streamline »

En 2016, il formalise une technique personnelle baptisée Streamline. Cette approche repose sur une découpe longitudinale du volume, inspirée des lignes aérodynamiques. Vue de face, la sculpture semble s’effacer. De biais, elle réapparaît.

« J’ai créé cette technique que j’ai nommée Streamline pour représenter la vitesse et symboliser la recherche effectuée en soufflerie. »

Ce principe l’inscrit dans la tradition de la sculpture cinétique, dans une veine contemporaine qui convoque aussi bien l’art que le design industriel.

La voiture comme muse et matière

Antoine Dufilho ne se contente pas de représenter les voitures : il les déconstruit, les réinvente, les dynamise. La mécanique devient pour lui un prétexte sculptural. Un vocabulaire de formes pures, où l’aérodynamisme, les courbes et les tensions deviennent matière à sculpture.

Tout commence en 2011 avec une interprétation stylisée de la Bugatti Type 35, traitée presque comme un dessin animé en volume, avec ses roues volontairement exagérées. En 2012, il crée sa première Bugatti Atlantic, véritable fondatrice de sa grammaire artistique : elle introduit la découpe en strates successives, alternant vide et matière.

Dès lors, chaque véhicule devient pour lui un terrain de recherche formelle. Il ne copie pas les lignes d’origine, mais en extrait l’ADN, les lignes de force. Qu’il travaille autour de la Porsche 911, de la DS, ou même d’objets hybrides issus de la compétition automobile, Antoine fait surgir le mouvement là où tout semble figé.

Dans la Gunmetal Symphony, inspirée de la Porsche 911, il utilise une série de tubes d’inox placés à intervalle régulier pour donner une impression de vitesse contenue, de vibration structurelle. L’œuvre, monochrome, capte la lumière comme une caisse de résonance.

Formula One rend hommage à la Formule 1 des années 90. Dépouillée, linéaire, presque chirurgicale, elle met en lumière l’équilibre fragile entre puissance et légèreté. Présentée au Grand Prix de France, elle a marqué les esprits par son minimalisme cinétique.

Avec Caméléon, Antoine explore la perception. La sculpture change de couleur selon l’angle de vue, du bleu au jaune, créant un effet d’optique mouvant. Ce jeu chromatique renforce la sensation de passage, d’accélération visuelle.

Velocity, quant à elle, puise dans l’architecture intérieure de la Bugatti Veyron pour révéler un tunnel central traversé de lumière. La forme semble aspirée vers l’intérieur. Le vide devient l’axe de propulsion.

En 2024, Antoine Dufilho conçoit Agility, une nouvelle interprétation monumentale de la Bugatti Type 35. Fabriquée en acier inoxydable microbillé, la sculpture articule une série de lames organiques dont les courbes fluides réinterprètent l’aérodynamisme du modèle historique. L’œuvre semble surgir d’un instant de course figé. Le métal reflète la lumière pour renforcer l’illusion de mouvement et d’élan suspendu.

Chaque pièce évoque une mémoire mécanique, un souffle aérodynamique, une pulsation silencieuse. Comme il l’explique :

« Notre cerveau tend à imaginer la suite logique des événements. L’asymétrie crée une illusion de mouvement. »

En somme, Antoine ne sculpte pas des voitures : il sculpte ce qu’elles racontent, le flux qu’elles provoquent et l’émotion visuelle qu’elles génèrent lorsqu’elles ne sont plus que des lignes, des strates, des tensions suspendues.

Au-delà de l’automobile

Antoine Dufilho explore aussi l’abstraction. Il réalise des sculptures architecturales comme le Chrysler Building ou la Statue de la Liberté. En 2024, il présente La Dolce Vita, une œuvre inspirée du Riva Aquarama, mêlant acier corten et inox miroir.

À partir de 2025, il souhaite créer des formes détachées de toute référence figurative. « Je veux aller plus loin dans la légèreté, jusqu’à faire disparaître la matière. »

Une reconnaissance mondiale

Représenté dans plus de 40 galeries, Antoine expose à Paris, Genève, Londres, Miami, Dubaï, Taïwan… Sa Bugatti Atlantic est exposée au Petersen Museum de Los Angeles.

Parmi ses collectionneurs : Jean Todt, Peter Mullin ou encore de grandes galeries européennes. Il partage son travail en coulisses sur Instagram et ses dernières actualités sont accessibles ici : Actualités d’Antoine Dufilho.

Repères chronologiques

  • 2011 : Première sculpture Bugatti Type 35 stylisée
  • 2012 : Première Atlantic en strates ajourées
  • 2016 : Invention du style « Streamline »
  • 2020 : Red Racing Flower exposée à La Baule
  • 2022 : Red Stream au Mondial de l’Auto
  • 2023 : Caméléon exposée à Rétromobile
  • 2024 : Installation de La Dolce Vita au Touquet
  • 2025 : Série de sculptures abstraites + nouvelles expositions

Bien plus qu’un sculpteur

Antoine Dufilho n’est pas un simple sculpteur automobile. C’est un architecte du vide, un poète du mouvement, un artiste complet qui donne vie à l’invisible. Il réconcilie l’art, la technique et la vitesse dans une même œuvre. Sa démarche cinétique, son usage du métal et sa capacité à sublimer la lumière le placent aujourd’hui parmi les sculpteurs contemporains les plus remarqués.